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Si vous vous êtes récemment promené sur la montagne, que ce soit sur le chemin Olmsted ou au belvédère Camillien-Houde, vous avez peut-être vu ou entendu des travaux d’abattage dans les boisés. La raison? La présence de l’agrile du frêne qui s’en prend à nos espaces verts. Après plus de deux ans de travaux (traitement et abattage), la montagne redeviendra bientôt le havre de paix et de tranquillité qui en fait sa renommée.
 


La Ville face à une infestation grande comme la montagne 


C’est en 2011 que le premier cas d’agrile a été découvert à Montréal. Dès l’année suivante, la Ville mettait en place une stratégie pour réduire les impacts de cet insecte sur la forêt urbaine montréalaise. L’intervention en milieu boisé a commencé un peu plus tard. C’est donc en 2017 que les premières actions ont été entreprises sur la montagne. En effet, cet insecte ravageur d’Asie de couleur vert métallique pose un problème majeur sur l’ensemble du territoire.

On procède alors au recensement des 10 000 frênes sur la montagne. Le constat est sans appel : 6 000 sont sains, mais 4 000 sont morts ou dépérissants dans les boisés du parc du Mont-Royal et du parc Tiohtià:ke Otsira’Kéhne au sommet Outremont.

La Ville met en branle un plan d’action à quatre volets :
  • le traitement des frênes sains,
  • l’abattage des frênes morts ou dépérissants,
  • la plantation d’arbres et d’arbustes et
  • l’exploration des moyens de lutte à plus long terme.
Tout au long du projet, Les amis de la montagne sont appelés à jouer un rôle de sensibilisation et d’interprétation auprès du grand public. Notre patrouille de conservation est présente sur le terrain pour informer le public des différents travaux en cours. L’équipe sensibilise les usagers aux enjeux environnementaux et à l’importance de protéger les milieux naturels de la montagne.

Le traitement de 6 000 frênes : aux grands maux, les grands remèdes

Il n’existe encore aucun moyen assez efficace pour éradiquer complètement l’agrile du frêne, mais il est toutefois possible d’en ralentir la propagation à l’aide d’un traitement aux deux ans. La Ville a donc rapidement traité les 6 000 frênes sains sur le mont Royal avec le TreeAzin®, un biopesticide injecté à la base des troncs d’arbres. Il s’agit de la méthode utilisée par la Ville de Montréal.

L’abattage de 4 000 frênes : un mal nécessaire pour le bien-être des boisés

Rappelons que les travaux de lutte contre l’agrile du frêne contribuent au maintien de l’intégrité de la forêt du mont Royal. Pour amortir l’impact de l’abattage, la coupe des arbres morts et dépérissants s’est faite en phases :
  • Hiver 2018 : travaux d’abattage dans le bois d’Outremont, au sommet du parc du Mont-Royal et au parc Tiohtià:ke Otsira’Kéhne au sommet Outremont
  • Automne 2018 et hiver 2019 : travaux d’abattage dans le Piedmont, la fougeraie, la clairière du lac aux Castors et l’entrée Peel du parc du Mont-Royal
Les travaux d’abattage se déroulent en hiver pour minimiser les impacts sur les sols, la végétation et les oiseaux nicheurs comme le petit-duc maculé ou le grand pic. D’ailleurs, c’est le moment opportun d’agir sur l’agrile  afin de détruire les larves dans le bois avant leur émergence.

C’est en janvier et février 2019 qu’a donc eu lieu la dernière phase d’abattage sur le mont Royal : 900 frênes dans le secteur du piémont, sous le belvédère Camillien-Houde, et 440 frênes dans le secteur du parc le long des avenues Cedar et des Pins. Cela complète ainsi la coupe des 4 000 frênes prévue il y a deux ans.

La dernière phase du plan d’action comprendra les travaux de reboisement dans les différents secteurs de la montagne de 2018 à 2020.

Restauration écologique en cours

Pour compenser la perte des frênes et préserver la qualité exceptionnelle des milieux naturels du mont Royal, la Ville de Montréal plantera des milliers d’arbres et arbustes d’ici 2020. Jusqu’à maintenant, un total de 7 120 arbres et 2 130 arbustes ont été plantés en 2018.

Le reboisement permettra de refermer les trouées causées par l’abattage, d’éviter que l’espace ne soit occupé par des plantes envahissantes et d’accroître la diversité des arbres.

Les amis de la montagne contribuent au reboisement en menant plusieurs actions de plantation dans le cadre de notre programme d’intendance environnementale qui priorise aussi le contrôle des espèces envahissantes dans les zones d’intervention.



Le bois coupé peut être récupéré et réutilisé

Pour certains, l’épidémie de l’agrile du frêne représente l’occasion d’élaborer des projets urbains faits à base de bois de frênes abattus. Mais attention, pour être revalorisé correctement, le bois infesté doit être traité par des spécialistes. En effet, les frênes abattus peuvent contenir des larves d’agrile qui vivent sous l’écorce et ne sont pas toujours visibles.

Selon leur diamètre, les frênes abattus et récupérés du mont Royal sont déchiquetés en copeaux (pour détruire toute trace de larve sous l’écorce) ou revalorisés grâce à la transformation et à l’utilisation pour divers projets urbains locaux. 

Au printemps 2018, la Ville accorde un contrat à l’organisation Bois public pour transformer le bois provenant de l’abattage des frênes dans les parcs du Mont-Royal et Tiohtià:ke Otsira'kéhne. Quelque 150 billots de frêne deviendront ainsi des planches séchées, planées et prêtes à être utilisées dans des projets d’ébénisterie. Outre la transformation des billots en planches, le projet permettra de fabriquer un séchoir à bois solaire, de développer des partenariats communautaires pour réaliser des projets avec le bois récupéré et de concevoir et de fabriquer environ 75 articles de mobilier.

À titre d’exemple, le Café suspendu qu’abritait le belvédère Camillien-Houde à l’été 2018 était aussi fait de bois de frêne récupéré.


crédit photo: La Pépinière | Espace collectif

Solutions écologiques alternatives mises à l’épreuve

À l’été 2017, de nombreux visiteurs ont remarqué d’étranges pièges installés dans certains frênes situés dans les aires ouvertes du parc du Mont-Royal. Il s’agissait en fait de pièges entonnoirs permettant la contamination des agriles à l’aide d’un champignon. Comportant des phéromones femelles, ces pièges attiraient puis contaminaient les agriles mâles qui infectaient, à leur tour, les femelles lors de l’accouplement. S’il s’avère efficace, ce traitement devra être reconduit annuellement.



La guêpe d’Asie pour lutter contre l’agrile

Un projet de contrôle biologique de l’agrile a été effectué dans certains boisés de l’île de Montréal en 2015 et 2016. Le projet consistait à relâcher des ennemis naturels de l’agrile, deux espèces de guêpes originaires de la Chine (de la même région d’où provient l’agrile du frêne), dans certains boisés. Ces guêpes contaminent les agriles par la ponte dans les œufs ou larves. Il est à noter que ces espèces de parasitoïdes ne posent aucun danger aux humains. Ce projet a été testé au parc-nature du Bois-de-Liesse, au Jardin botanique et au Bois Summit de Westmount, mais il faudra attendre plusieurs années avant d’en voir les impacts, le temps que les guêpes s’établissent sur la montagne.

Des chevaux en renfort

Même la puissance des chevaux est testée sur le mont Royal! Pendant une courte période en hiver, la Ville fait appel à une entreprise de débardage avec chevaux pour transporter les branches et troncs d’arbres abattus dans les zones boisées. En évitant l’utilisation de machinerie lourde, ce projet de huit jours aura permis d’évaluer si l’utilisation de chevaux réduisait les dommages au sol et à la végétation.



Pour et sur la montagne, chaque geste compte

Même s’il sera difficile, voire impossible, d’éradiquer l’agrile du frêne, le plan d’action mis en place par la Ville de Montréal aura bénéficié la montagne et servi à ralentir l’épidémie. Selon Éric Richard, directeur de la conservation chez Les amis de la montagne, la Ville a mené un projet exemplaire avec le souci de réduire l’impact sur les milieux naturels. « Les amis de la montagne sont satisfaits des résultats de ce projet d’envergure, mais la lutte n’est pas terminée. Dans les années à venir, nous verrons encore des frênes malades ou dépérissants. » Reste à voir si toutes ces actions porteront fruit à long terme.

Vous aimeriez en savoir plus sur l’agrile du frêne ou le projet de la Ville? Nous prévoyons tenir des kiosques durant le relâche scolaire à la maison Smith et au pavillon du Lac-aux-Castors.
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